著者
苅谷 俊宣
出版者
日本フランス語フランス文学会
雑誌
フランス語フランス文学研究 (ISSN:04254929)
巻号頁・発行日
vol.98, pp.161-170, 2011-03-18 (Released:2017-08-04)

Ecrivain, poete, Antonin Artaud est aussi un epistolier digne d'attention. Ce qui caracterise sa correspondance, ce n'est pas la quantite, mais l'usage qu'il en fait. Curieusement, Artaud ne distingue pas ses lettres de ses oeuvres et publie de preference ses lettres. L'epistolaire n'est pas convoque pour son usage biographique mais comme production litteraire. Cette confusion entre la vie et l'oeuvre a toujours ete une problematique chere a Artaud. Sa carriere litteraire debute avec la publication de sa Correspondance avec Jacques Riviere (1924). Seulement, apres avoir accepte l'invitation de ce dernier a publier leurs missives comme oeuvre litteraire, Artaud lui reproche de <<chercher a mettre sur le plan litteraire une chose qui est le cri meme de la vie>>. Artaud souhaite que ses ecrits temoignent de chaque instant de sa vie, c'est pourquoi il publie regulierement des lettres. Cependant, de par leur nature fragmentaire, les lettres ne peuvent representer une realite totale, celle par exemple qu'Artaud des annees 1930 s'efforcera de retrouver dans l'esoterisme. Les oeuvres epistolaires d'Artaud des annees 1940 mettent en jeu cette contradiction, plutot qu'elles ne la resolvent. Dans les Lettres de Rodez (1946), Artaud denonce des complots contre lui, auxquels on ne trouve aucune reference exterieure. Alors que les lettres portent la mention de dates et de destinataires reels, tout est, pour Artaud, mensonger en dehors de ses ecrits. Les lettres d'Artaud sont donc une sorte de trompe-l'oeil. La realite ne s'exprime qu'au pied de la lettre. Il en est ainsi pour l'identie de poete. Artaud nous le demontre par sa lecture d'une lettre de Lautreamont (<<Lettre sur Lautreamont>>).