論文/ArticlesCet article a pour but de mettre en relief les caractéristiques essentielles de la version « institutionnelle » des sciences religieuses en France, notamment celles des dernies décennies du 19e siècle. Nous nous attarderons d'abord à éclairer la connotation des mots « science(s) religieuse(s) » et « histoire des religions ». Puis, nous examinerons la propagande d'Albert Réville et de Maurice Vernes pour instituer cette nouvelle discipline académique dans leur pays. C'est dans ce contexte qu'une chaire d'histoire des religions est créée au Collège de France (1880) ainsi qu'une nouvelle section à l'École Pratique des Hautes Études (1886). Nous nous intéresserons à ce qui sépare cette nouvelle science de l'ancienne théologie catholique. Or, nous allons aussi découvrir certaines similitudes implicites entre elles. Nous suivrons ensuite le développement méthodologique de cette science : l'histoire historicisante de Maurice Vernes, l'histoire évolutionniste psychologique d'Albert et Jean Réville, et enfin, la sociologie anthropologique des durkheimiens (Henri Hubert et Marcel Mauss). C'est à travers les débats parfois violents entre ces chercheurs que se développe la jeune discipline académique. En effet, c'est grâce à l'intervention sociologique que l'allure protestante de la 5e section de l'EPHE s'atténue et que les caractères christiano-centristes des études religieuses se relativisent.