著者
伊藤 洋司
出版者
日本フランス語フランス文学会
雑誌
フランス語フランス文学研究 (ISSN:04254929)
巻号頁・発行日
no.83, pp.56-65, 2003-10-21

Les nombreuses lettres d'amour ecrites de 1914 a 1916 par Guillaume Apollinaire, a Lou puis a Madeleine, presentent un interet non seulement documentaire, mais aussi litteraire. Notre propos est d'etudier la poetique de ces lettres. La presence de poemes epistolaires ainsi que le projet de publier des lettres definissent en premier lieu la litterarite des lettres a Lou et a Madeleine. Les nombreux poemes epistolaires qui leur ont ete envoyes ne peuvent etre reduits a une simple ebauche des poemes publics; ils possedent un univers poetique specifique. Par ailleurs, Apollinaire a tente de realiser un roman intitule Ombre de mon amour... a partir des lettres envoyees a Lou. Mais ses lettres d'amour presentent aussi un interet litteraire en elles-memes. Dans son discours amoureux, Apollinaire adopte souvent un ton poetique pour seduire sa bien-aimee. Il fait d'elle une muse, une deesse, qui lui inspire l'ecriture de ces lettres. En deployant librement son imagination, il semble rechercher raccomplissement de l'amour dans un espace poetique. Enfin, les lettres a Lou et a Madeleine comportent non seulement des passages lyriques, mais aussi de nombreux passages ≪bavards≫. Le poete accorde une grande importance a son ≪bavardage≫ epistolaire, ou transparaissent les traces directes de sa vie. Ce ≪bavardage≫ est lie a une poesie particuliere de la lettre d'amour. La poesie est ainsi presente dans l'mtegralite des lettres a Lou et a Madeleine; ces lettres constituent finalement l'activite poetique principale d'Apollinaire pendant la guerre.
著者
中江 太一
出版者
日本フランス語フランス文学会
雑誌
フランス語フランス文学研究 (ISSN:04254929)
巻号頁・発行日
vol.120, pp.67-82, 2022 (Released:2022-03-31)

L’île « déserte ouverte » de L’Empreinte à Crusoéles animaux naufragés chez Defoe, Tournier, ChamoiseauTaichi NAKAE   Chamoiseau creuse, pour renouveler le mythe de l’île déserte, « l’interstice » laissé par ses deux précurseurs, Defoe et Tournier. Si la plupart des recherches interrogent la réécriture de Chamoiseau du point de vue postcolonial, le présent article propose une lecture éco-critique de L’Empreinte à Crusoé, en comparant la description que fait Chamoiseau des animaux naufragés avec celles qui se trouvent dans les romans de Defoe et de Tournier.   Dans les romans de Defoe et Tournier, plusieurs animaux échouent sur l’île déserte en même temps que Robinson. Chez Defoe, les animaux venus de l’Occident n’ont de valeur qu’à la condition qu’ils ne s’ensauvagent pas et restent les compagnons de leur maître, qui craint l’envahissement de la nature sauvage dans son royaume civilisé. Les chatons, croisement des races européenne et indigène, sont donc victimes des massacres commis par Robinson Crusoé.   Certes Vendredi ou les limbes du Pacifique, souvent considéré comme l’expression d’un retour à la nature, marque un tournant écologique dans la robinsonnade, mais son île déserte est un espace clos, un écosystème exclusif où les êtres allogènes ne peuvent survivre, à l’exception de Robinson. Ainsi, les rats européens se font exterminer par les rats indigènes.   Dans L’Empreinte à Crusoé où le héros est amnésique, ce n’est pas le navire échoué, mais le courant marin qui transporte les animaux sur l’île déserte. À l’opposée de ceux de Robinson Crusoé et de Vendredi ou les limbes du Pacifique, les animaux allogènes comme le singe et les opossums se mêlent sans difficulté aux espèces indigènes. Cette vision de la nature créolisée, et de la perméabilité du monde extérieur et du monde intérieur, représente, pour reprendre une expression d’Écrire en pays dominé, une « île déserte ouverte » faisant contraste avec l’île déserte en tant qu’ « absolu » de Tournier, qui est complètement séparée du dehors.
著者
森脇 慧
出版者
日本フランス語フランス文学会
雑誌
フランス語フランス文学研究 (ISSN:04254929)
巻号頁・発行日
vol.121, pp.85-101, 2022 (Released:2022-08-31)

La Vie scélérate à travers La Vie sans fardsroman, autobiographie et biographie chez Maryse CondéKei MORIWAKI   Cet article propose de relire La Vie scélérate à partir de La Vie sans fards pour repenser la relation entre les romans et les œuvres (auto)biographiques chez Maryse Condé.  La Vie scélérate est un roman paru en 1987, dans lequel Condé raconte l’histoire d’une famille bourgeoise noire de Guadeloupe à travers quatre générations, et La Vie sans fards est la deuxième œuvre autobiographique, parue en 2012, dans laquelle l’auteure raconte sa démarche en Afrique dans les années 60. Malgré le décalage des dates de parution et des sujets, l’écrivaine suggère dès les titres une relation profonde entre les deux œuvres : la conformité de l’expression « La Vie », la consonance en « s » et l’assonance en « a » les reliant phonétiquement.  En outre, nous pouvons remarquer une concordance des arbres généalogiques des familles dans les deux œuvres. À cet égard, sont particulièrement significatives la présence de Claude dite Coco, fille de quatrième génération de la famille et narratrice de La Vie scélérate, et celle de Denis, le premier fils de Condé. En effet, les circonstances de leur naissance (l’écrivaine confie pour la première fois, dans La Vie sans fards, la « vérité » que Denis est bâtard) et de leur enfance sont semblables. En outre, leurs descriptions, dans les deux livres, présentent des analogies textuelles. Si nous relisons La Vie scélérate par cet intermédiaire, Claude apparaît ainsi comme le double de Denis.  Or Condé a déclaré avoir une relation complexe avec son fils aîné : pendant longtemps, elle n’a pas pu accepter d’être mère célibataire et a dissimulé la naissance de Denis ; plus tard, elle n’a pas pu accepter qu’il soit homosexuel (le choix du nom épicène « Claude » reflèterait ce fait) ni qu’il ait voulu devenir écrivain. À l’époque où Condé a écrit La Vie scélérate, Denis souffrait de ce rejet de son identité et avait quitté sa mère.  Cette relecture nous permet de présenter de nouvelles interprétations de La Vie scélérate : à travers le personnage de Claude, Condé raconte l’histoire fantasmée de Denis, auquel elle dédie ce roman en tant que mère écrivaine. Elle a ainsi voulu légitimer son fils par sa propre création, en espérant qu’il bâtirait sa propre identité comme Claude, qui le fait et décide d’écrire un roman éponyme à la fin de l’intrigue.
著者
岩松 正洋
出版者
日本フランス語フランス文学会
雑誌
フランス語フランス文学研究 (ISSN:04254929)
巻号頁・発行日
vol.77, pp.60-71, 2000

Traditionnellement, les recits de voyage imaginaire exploraient les regions lointaines car la plausibilite d'un pays imaginaire augmente a mesure que se reduisent les connaissances historico-geographiques du lecteur. Au XX^e siecle, au contraire, beaucoup d'ecrivains installent leurs pays imaginaires paradoxalement en Europe. Nous traitons ici les pays imaginaires censes se situer en Europe orientale: 1. Poldevie (1): Cette caricature d'un pays de l'Est, inventee en 1929 par Alain Meillet, journaliste nationaliste, reapparut trois fois jusqu'a l'annee 1945 figurant dans Les derniers jours (1936) de Raymond Queneau, la ≪Legende poldeve≫ (42) de Marcel Ayme, Mon ami Pierrot (45) de Queneau. 2. Orsinie: Chroniques orsiniennes (1976) et Malafrena (79) d'Ursula K. Le Guin, postulent un pays europeen suppose peripherique (Malafrana decrit le XIX^e siecle de ce pays sous l'influence du regime Metternich). 3. Caronie: Roman Roi (1983) et Roman furieux (87) de Renaud Camus precisent la situation historico-geographique de la Caronie par la carte geographique, la genelogie du royaume (ou se trouve Josephine Tascher et la reine Victoria) et un dictionnaire biographique. 4. Poldevie (2): La Belle Hortense (1985), L'Enlevement d'Hortense (87), L'Exil d'Hortense (90) et Le Chevalier Silence (97) de Jacques Roubaud reprennent la Poldevie comme pays purement speculatif et ≪impossible≫ a la maniere de Borges ou de Calvino. Notre etude vise a une poetique descriptive des systemes onomastiques qutonomes, du point de vue semantique; nous examinons la variete de la relation entre l'invention fictive, les elements de la realite, et les emprunts intertextuels des oeuvres precedentes.
著者
郷原 佳以
出版者
日本フランス語フランス文学会
雑誌
フランス語フランス文学研究 (ISSN:04254929)
巻号頁・発行日
vol.77, pp.36-48, 2000-10-21 (Released:2017-08-11)

Cette etude est une reflexion sur la narration d'un romen de Maurice Blanchot, Le Tres-Haut (1948). Au cours de notre lecture, nous nous referons a la notion d'≪inquietude≫: nous essayons de montrer qu'il n'y a dans ce roman ni commencement ni fin, que le narrateur n'y parle pas son langage, qu'il ne peut meme etre distingue des paroles narrees, c'est-a-dire du roman lui-meme. Klossowski a fait remarquer que le nom du personnage narrateur, Henti Sorge, devait etre traduit en allemand par Heinrich Sorge, car le Sorge, ≪souci≫, est une notion heideggerienne importante: l'etre propre du Dasein, de ≪l'etre-la≫. Or vers la fin du roman, un personnage, Jeanne, appelle Henri Sorge ≪le Tres-Haut≫. Ces deux noms, Henri Sorge et le Tres-Haut, indiquent que le narrateur est Dieu comme pur souci et rappellent le caractere inquietant du nom de Dieu comme pur souci et rappellent le caractere inquietant du nom de Dieu, voire de tous les noms. Mais ≪le Tres-Haut≫ est aussi le titre du roman. D'ou une sorte d'inchainement de l'≪inquietude≫: outre le narrateur et ses paroles qui sont le roman, sont inquietees la notion d'auteur et celle de Dieu, de sorte que personne ne peut plus etre sujet de la narration. De fait, l'epigraphe se compose de deux repliques d'Henri extraites du texte a l'epigraphe se compose de deux repliques d'Henri extraites du texte a suivre, ou il est affirme sous la forme ≪je suis…≫ qu'on est un piege et la verite. Le ≪je≫ qui, a cette place, est a la fois Henri et le roman et l'epigraphe, donne un avertissement a celui qui s'apprete a parler autant qu'au lecteur. La premiere phrase du roman est aussi une sorte de citation: l'affirmation ≪j'etais un homme quelconque≫ est la reprise a l'imparfait d'une replique d'Henri. Jeanne l'a nomme ≪le Tres-Haut≫, Henri denie desesperement, mais l'exces meme de sa reaction suggere la justesse des mots de Jeanne. Tout le roman peut alors etre lu comme les parolos par lesquelles Henri se denie comme Dieu. Si ses paroles sont aussi vehementes, c'est que sans ce deni, il deviendrait Dieu transcendant, sans plus pouvoir exister comme Henri. Jeanne, au contraire, ne suppoorte pas que Dieu existe devant elle, et elle tire sur Henri. En vain, puisque la derniere phrase du roman est ce cri d'Henri: ≪Maintenant, c'est maintenant que je parle≫. L'histoire du Tres-Haut peut etre consideree comme narree a partir de cet instant, sans qu'Henri, malgre sa declaration, puisse parler son langage. Henri Sorge a passe la mort et ne survit que comme langage, il est a la fois poete et le langage de la poesie.